• Interview de Siriki Ouattara

    Interview de Siriki Ouattara

    Marion et Ambre ont "rencontré" le Tirailleur Siriki Ouattara (71° BTS, 4° Cie, matricule 17550)
    à Dakar lors de son embarquement pour l'Europe.

     

    Siriki s'est présenté comme un agriculteur né à Bananso près de Sikasso au Soudan français. Il a parlé avec fierté de ses productions : haricots, patates, bananes, mil, citrons, tomates, kolas... avant d'expliquer comment il s'est retrouvé dans l'armée française.

     

    " - Pour quelles raisons vous êtes-vous engagé ?

    Moi, je ne me suis jamais engagé. Ils m'ont forcé à devenir soldat.

     

    - Pouvez-vous nous expliquer comment ils vous ont forcé ?

     En 1912, les français cherchaient des tirailleurs partout pour partir au Maroc. Dans les forêts autour de mon village, ils ne trouvaient aucun garçons car ils étaient tous cachés. Alors le Commandant du Cercle a organisé une grande chasse aux bœufs sauvages. Tous les garçons étaient contents et sont sortis de leur cachette. Tous les garçons ont ensuite été regroupés devant les bœufs morts. A ce moment là, un officier a noté le nom de tous les garçons, celui de leurs parents et leur adresse pour que plus personne ne puisse se sauver. C'est comme cela qu'ils m'ont pris comme soldat.

     

     - Est-ce qu'ils vous ont emmené comme un prisonnier ?

    Non, le premier jour, ils m'ont demandé si je voulais devenir soldat. J'ai répondu que je ne voulais pas, que j'étais content d'être cultivateur et que je voulais le rester.
    Le deuxième jour, ils m'ont redemandé et j'ai répété que je ne voulais pas.
    Le troisième jour, ils m'ont dit que si je n'accepte pas, c'était ma mère qui va y aller à ma place. J'ai beaucoup rigolé car les femmes ne peuvent pas être soldats ! Mais alors, ils prendront ma mère pour l’emmener à la prison de la ville. Alors j'ai pensé au fond de mon cœur que je devais m'engager car je suis un garçon. On ne peut pas laisser ce malheur aux femmes.
    Le Chef du village est allé voir ma mère : « Le Major va prendre ton garçon, ton Siriki mais il est trop petit ! » Mais le Major a dit tout le contraire : « Ce garçon là n'est pas bien grand, mais il est le meilleur pour le service. »
    Ma Maman a quand même fait à mangé ce jour là et puis le lendemain. Nous n'avions pas faim et n'arrêtions pas de pleurer.

     

    - Vous pleuriez avec votre mère ?

    Je pleurais même plus que ma mère (dit Siriki en riant) car je pensais toujours dans ma tête que j'étais foutu... "

     

    Siriki Ouattara est "Mort pour la France" le 19 mars 1919 à l'hôpital n°64 de Lyon des suites de maladies (pieds gelés et albuminurie).
    Il est enterré à la Nécropole nationale de La Doua.

     

    Marion et Ambre

    Interview inspirée du témoignage d'un tirailleur
    cité dans le livre de Lucie Cousturier "Des inconnus chez moi"

     

    « Journal de Tousma NientiemaInterview d'Abdoulaye Niang »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :